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Critiques de livres


Armand SYLVESTRE
Conversation avec Léon Wuidar
éditions Tandem
2002
39 p.

A bicyclette

Tandem. Portent bien leur nom, ces éditions-là. Un artiste et un critique sur le même vélo. Et ça discute. C'est pas comme la voiture : le paysage dé­file lentement, on a le temps de le regarder. Le paysage ? La production de l'artiste en question, son parcours que les deux com­pères retracent ensemble justement, à bicy­clette. Déjà roulé sur un tandem, moi. Pas facile, l'engin. Pas toujours maniable. Eh, toi, je t'ai à l'œil, je sens bien que tu te laisses aller, que tu pédales pas comme il faut ! Allez, du nerf ! Et où qu'on va ? Je sais pas, on pédale. C'est le voyage qui im­porte.

Constatation : les voyages, comme les quatre derniers numéros de ces conversations (une quarantaine de titres parus), se suivent, mais ne se ressemblent pas. Pour des raisons simples et évidentes, me semble-t-il. D'abord, la personnalité de l'artiste, ensuite, la person­nalité de son interlocuteur, enfin la relation qu'ils entretiennent ou créent — car l'histoire ne dit pas toujours s'ils se connaissent avant, ou s'ils se découvrent à cette occasion. Ainsi, Léon Wuidar, lorsqu'il parle avec le peintre Armand Sylvestre, peut évoquer un passé commun dans la ville de Liège, et l'on sent une proximité très forte, lorsqu'ils évoquent la vitrine de ce magasin de bonbons en face de l'église Sainte-Catherine, que Sylvestre re­présenta dans une de ses toiles. Ici, le mot conversation prend tout son sens, et on a l'impression de se retrouver dans un salon où les compères sirotent un cognac en évoquant des souvenirs d'après-guerre.


Thierry RENARD
Conversation avec Jacques Sojcher
éditions Tandem
2002
89 p.

Conversation aussi, légèrement plus distante, plus technique, entre Vincent Baudoux et l'illustrateur Ever Meulen, et qui témoigne de la part de Baudoux d'une excellente maîtrise de son sujet. Ici le critique et l'artiste s'entendent à merveille pour replacer l'œuvre dans le contexte de l'époque et pour en sou­ligner les enjeux esthétiques. Avec le photo­graphe Jacques Vilet et Yvonne Resseler, c'est une conception artistique, voire une philosophie à part entière, qui se dégage. Et comme il sied à ce type de discussion, les pa­roles sont pesées, le style parlé soigné ; de plus, la transcription de l'entretien est précé­dée par un commentaire introductif où les réflexions du photographe appuient celle du critique. Quant au philosophe Jacques Sojcher, il structure sa parlote avec le collagiste Thierry Renard sur le mode du dictionnaire — clin d'œil à Gilles Deleuze ? — et la clôt par un texte d'interprétation où il décrit en outre quelques circonstances de leur amitié, ce qui me fait plaisir pour eux. Le découpage par thème met en évidence le soin particulier que le collagiste apporte autant à la réflexion sur son art qu'à la pratique de celui-ci. Ces conversations offrent au lecteur une plongée dans le paysage visuel de l'artiste. Des illustrations permettent en outre au lec­teur de ne pas se faire distancer par l'étrange machine. Et l'on peut dire que dans ces der­niers numéros, le tandem avance bien. Qu'on ne se retrouve pas souvent les genoux écorchés, sur le bord de la route, un tampon imbibé de mercurochrome dans les mains. Aussi est-ce un vrai plaisir que de suivre les larrons. Comme disait un autre artiste, mais de variété celui-là : « Vive le vélo ! ».

Pascal Leclercq

Ever MEULEN, Conversation avec Vincent Baudoux,  éditions Tandem, 2002, 78 p.

Jacques VILET, Conversation avec Yvonne Resseler,  éditions Tandem, 2002, 67 p.