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Critiques de livres


Gaspard HONS
Dans les failles de la lecture et du silence
vol. 2
1997-2001
Éditions de L'ambedui
Cahiers du Théâtre-Poème
2002
178 p.

Mots trouvés, mots jetés

Gaspard Hons n'est pas un critique de poésie, il est un passeur. Le titre de son recueil de chroniques le dit assez, Dans les failles de la lecture et du si­lence, il est un rôdeur inquiet et scrupuleux, un attentif aux mots et à leurs échos, aux émotions du poème. Il y a dans la lecture silencieuse une recherche du secret, de la vi­bration, un travail des sens. Gaspard Hons scrute, dans ce qui s'écrit aujourd'hui, de quoi alimenter son panthéon littéraire dont il propose régulièrement la visite guidée. Ce deuxième recueil de la chronique qu'il tient dans le Mensuel du Théâtre-Poème couvre les années 1997 à 2001 et se présente sous forme alphabétique de Jacques Ancet à Ab­dallah Zrika en passant par J. Izoard, W. Lambersy, M. Lambiotte, C. Norac et M. Voiturier parmi de nombreux autres. Hons, certainement, se nourrit de la lecture des poètes ; elle semble nécessaire à sa vie et à sa propre pratique poétique. Il n'em­pêche, ses chroniques donnent à la fois une leçon d'humilité et d'attention à l'heure où l'on peut se plaindre du manque d'audience pour la poésie mais où l'on sait aussi que les poètes ont trop souvent tendance à ne s'in­téresser qu'à eux-mêmes... Sans doute Hons a-t-il quelques tics, certaines manies et ses favoris, mais il travaille en éveilleur : il déploie au jour et provoque des ren­contres. Ce recueil de chroniques n'est pas à dévorer comme un roman à suspense mais à aborder avec une attention passionnée, celle-là même qui caractérise l'auteur et qu'il cherche à insuffler, sans prosélytisme mais avec enthousiasme.


Gaspard HONS
Ly's Light
Editions Phi/Ecrits des Forges
coll. Graphiti
136 p.

Pour paraphraser un de ses titres, je dirai qu'il n'y a ni écart ni distance entre l'acti­vité critique de Hons et sa production poétique. Ses poèmes se forgent sur ses lectures, entremêlent notes et citations. Ly's light nous entraîne dans une expérience romaine, un séjour dans la ville éternelle que l'auteur double d'une rencontre étonnante. Peut-on croiser une héroïne de roman ? Le rêve a autant d'importance que le réel et Hons croise la Nadja de Breton tout en évoquant la lumière de Lyse. L'existence du poète est bien fragile dans cette ville à la si longue histoire ; les poèmes en deviennent une mé­ditation qui refuse de reconstruire les ruines pour ne pas s'attarder au passé et une affir­mation de l'être au présent même s'il ne se passe rien, même si les mots refusent de si­gnifier et même si le corps ressemble à une épave conservée comme dans un herbier. Entre les mots trouvés et les mots jetés par lui, Hons fait de la poésie une expérience intime. Et la question reste posée de savoir comment dire cela à un lecteur extérieur. C'est là tout le secret de la poésie, un secret qu'Hons ne perce pas mais qui sédimente dans ses poèmes. De son silence à notre écoute, il brosse la trace d'une errance et in­vite au voyage.

Jack Keguenne